C’est lundi matin et vous commencez une visioconférence « Zoom » avec un collègue de travail, le sourire aux lèvres, en lui demandant gentiment : « Bonjour, comment allez-vous ? » Votre collègue vous répond : « JE VAIS… BIEN !! », en utilisant une voix forte et grave. A moins que ce ne soit un comportement normal pour cette personne (sa baseline), vous risquez d’être probablement un peu refroidis. Imaginez que ce soit la réponse que vous avez reçue à votre bonjour… réfléchissez un instant à ce que vous pourriez ressentir, et à ce qui vous passerait par la tête ?
Cela pourrait vous interpeller ; peut-être penserez-vous que votre collègue est bouleversé ou en colère à propos de quelque chose qui vient de se passer ? Peut-être vous en veut-il de lui avoir demandé comment il va alors que vous êtes au courant qu’il traverse une période difficile ? Ou peut-être, cela vous met en colère, en raison de la grossièreté de sa réponse à votre bonjour amical ?
Vous pourriez également vous questionner sur le moment et le contexte de votre appel en visio. Est-il trop tôt le matin, avant l’heure normale de début de la journée de travail ? N’était-ce pas prévu ? Que s’est-il passé avant ? Lui avez-vous envoyé un email critiquant sa performance ? Un appel précédent s’est-il terminé sur une mauvaise note ? Et ainsi de suite.
Ok… mais quoiqu’il en soit, avec ce petit échange de 7 secondes, il apparait clairement dans la réponse que quelque chose ne va pas, même si, souvent les indices que quelque chose ne va pas soient plus subtils. De plus, nous pouvons ne pas percevoir ses indices pour plusieurs raisons, dont celles-ci :
- Nous ne sommes pas attentifs – nous n’écoutons pas et/ou n’observons pas l’autre personne pendant la conversation.
- Nous sommes en « mode émetteur » – nous voulons arriver à placer que nous voulons dire et nous ne nous intéressons pas à ce que l’autre personne dit ou montre.
- Nous n’avons pas les compétences – la capacité de reconnaître ce que les autres peuvent penser et ressentir à partir de leurs multiples canaux de communication (les expressions faciales, le langage corporel, la voix, le style verbal, les mots et les signaux psychophysiologiques).
Ces deux premiers aspects concernent principalement l’attitude et le focus… ou l’état d’esprit.
L’état d’esprit : soyez curieux !
Si vous vous intéressez vraiment aux autres, vous aurez une appétence naturelle à écouter et observer les autres afin de pouvoir les comprendre à plusieurs niveaux. Vous regarderez sous la surface des mots et tenterez d’établir ce qu’ils ressentent et ce qu’ils pensent, voire quelles sont leurs valeurs et leurs croyances. Le modèle de l’iceberg illustre bien cette profondeur de compréhension :
Si vous ne possédez pas cette capacité naturelle, vous devrez peut-être vous efforcer de développer votre curiosité et votre empathie, de vous mettre au défi de comprendre ce que les autres ressentent et pourquoi ils disent ce qu’ils disent (plutôt que de simplement essayer de faire passer votre opinion, de prouver que vous avez raison et/ou de les juger superficiellement, eux ou leurs opinions.)
Le troisième point de la liste précédente concernait le volet des compétences nécessaires pour lire et décrypter le comportement des autres. Et bonne nouvelle, cela peut s’apprendre.
Adopter une approche à canaux multiples
L’astuce, c’est de tenir compte de toutes les informations qui proviennent de nos six canaux de communication :
Si nous revenons aux 7 premières secondes de l’échange Zoom, nous avons accès à 5½ canaux (nous ne pouvons généralement voir que la moitié supérieure du corps). Les indices qui peuvent être intéressants dans les trois mots « Je vais bien » sont donc présentés ci-dessous.
Par contre, faites attention… ne vous fiez pas à un seul indicateur… il y a six canaux pour que vous puissiez corroborer ce que vous voyez/entendez d’un canal à l’autre. Vous devez adopter une approche basée sur des hypothèses et tester vos hypothèses avec d’autres questions/problèmes si cela est approprié. Examinez comment leur comportement s’aligne sur l’RBC de l’analyse comportementale :
- ce qu’ils disent (le « Récit »),
- leur style habituel (leur « Baseline »), et
- ce qui se passe autour d’eux (le « Contexte »).
Le langage corporel et la psychophysiologie :
- Un petit signe de tête « oui » qui renforce le message affirmatif, ou
- De légers mouvements de tête « non » qui contredisent l’affirmation positive « Je vais bien ».
- Petits haussements d’épaules unilatéraux – petits signaux (ou « fuites ») qui suggèrent qu’une personne peut ne pas avoir confiance dans les mots qu’elle prononce à ce moment là.
- Le changement de teint du visage (difficile avec des teints plus foncés) ou la transpiration – peuvent signaler le stress ou la colère. Ou bien attention, votre interlocuteur vient de terminer un exercice physique.
Les expressions du visage :
- L’expression du visage nous donne-t-elle des indices sur l’émotion qui est ressentie ? Avantage : certaines expressions faciales sont universelles (en savoir plus).
- Ces émotions peuvent apparaître en moins d’une demi-seconde lorsque quelqu’un tente de les cacher. On appelle cela des micro expressions faciales.
- Si une personne ne va pas bien et se sent un peu triste, il y a deux signaux fiables : souvent, la partie intérieure des sourcils se soulèvent et les coins de la bouche s’abaissent.
La voix / le style /les mots :
- La façon dont les mots « Je vais bien » sont prononcés peut aussi vous donner de bons indices.
- Une baisse de volume peut signifier qu’une personne est triste, incertaine ou qu’elle ment sur ses sentiments. Cela peut également signifier qu’elle est aux prises avec la technologie et qu’elle veut simplement être entendue grâce à Zoom sur son iPad (c’est le « C » dans l’ABC).
- Une hauteur plus élevé que la normale peut signifier qu’une personne est stressée (colère ou peur ?) ou qu’elle ment.
Bien que le mot « mensonge » soit utilisé ici, nous ne devons pas nécessairement l’associer à une mauvaise intention. Les gens peuvent mentir sur ce qu’ils ressentent pour de nombreuses raisons :
- Par discrétion – ils veulent garder cela pour eux, que l’on respecte leur intimité.
- Le facteur temps – il se peut qu’ils ne disposent que d’un temps limité pour cette visioconférence Zoom et qu’ils ne souhaitent donc pas entamer une discussion plus approfondie.
- Le facteur relationnel – ils ne se sentent pas assez proches de vous pour parler de leurs problèmes. Il se peut qu’ils ne vous fassent pas confiance.
- Et enfin… il ne s’agit pas que de vous !
Parfois, les émotions d’une personne peuvent être provoquées par autre chose que qu’un appel avec vous. Il peut s’agir d’un événement antérieur, d’une pensée ou d’un sentiment concernant quelque chose d’autre
Conclusion
Alors avancez avec précaution, ne concluez pas trop vite, soyez empathique et restez curieux.
Article original de Cliff Lansley
DG EIA Group francophonie
Président Paul Ekman International
B Ed (Hons), MIOD, MABPsych, Cert Ed.
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